Egypte : des lois controversées menacent les travaux de la Constituante

Dix membres du comité chargé de réviser la Constitution égyptienne ont suspendu mardi 26 novembre leur participation aux travaux de cette assemblée après l’arrestation de 30 manifestants au Caire.
Hoda Al-Sadda, qui siège au sein de ce « comité des 50 », a expliqué s’être retiré, avec au moins neuf de ses collègues, après l’arrestation de ces manifestants qui dénonçaient un article autorisant les procès de civils devant des tribunaux militaires. « Le comité des 50 risque l’explosion, alors qu’il est la pierre angulaire de la transition », a déploré un autre, alors que les 50 membres se sont engagés àremettre une version finale du texte le 3 décembre au président par intérim, Adli Mansour.
Les manifestants ont été arrêtés parce qu’ils n’avaient pas obtenu du ministère de l’intérieur l’autorisation de se rassembler devant le Conseil de la choura (Sénat), où siège le comité des 50. Selon une loi controversée promulguée dimanche 24 novembre, les organisateurs doivent informer les autorités d’un rassemblement trois jours avant sa tenue. Si le ministre de l’intérieur estime que la manifestation représente une « menace pour la sécurité », ce dernier se réserve le droit d’eninterdire la tenue.
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MILITANTS ARRÊTÉS, JOURNALISTES CONDAMNÉS
Parmi les personnes arrêtées figurent plusieurs militants célèbres en Egypte, dont Mona Seif, qui avait fondé la campagne « No to military trials for civilians » (« non aux procès militaires pour les civils »), et Ahmed Harara, qui a perdu ses deux yeux à cause de tirs des forces de l’ordre dans des manifestations en 2011.
Le projet de Constitution révisée prévoit de maintenir un article permettant aux tribunaux militaires de juger des civils accusés d’avoir « nui » aux forces armées, une définition souvent interprétée au sens le plus large en Egypte. Trois journalistes ont récemment écopé de peines de prison ordonnées par des tribunaux militaires en vertu de cet article. Cette question des procès militaires de civils divise particulièrement le comité des 50.
Une autre manifestation a par ailleurs été dispersée mardi à coup de canons à eau au Caire, toujours en vertu de la loi promulguée dimanche. Ce texte, qui intervient sur fond de répression des partisans du président islamiste Mohamed Morsi, destitué par l’armée début juillet, prévoit, en cas de violences de la part des manifestants, une « utilisation graduée de la force ».
Source: Le Monde